En décembre 2019, la presse internationale a mis en avant le parcours atypique d’un jeune garçon de 9 ans, Laurent Simons, bientôt diplômé universitaire.
Ce sujet a touché, choqué, ébranlé, fasciné… il a fait la « une » de l’actualité durant quelques semaines.
Mais pourquoi ce sujet touche-t-il autant ?
Notre société est basée sur un système normatif. C’est cette norme qui fixe les règles du normal, de l’anormal et du pathologique. Une des normes mise en évidence à travers les différents
articles publiés dans la presse sur ce jeune garçon est « l’intelligence ».
Ce jeune garçon a des capacités intellectuelles qui lui ont permis de développer des capacités d’apprentissage hors normes. La personne qui se distingue des autres par des aptitudes particulières
dans des domaines de compétences valorisés par la société, engendre de la convoitise et/ou de l’admiration.
La différence fascine autant qu’elle effraye...
« La place d'un enfant de 9 ans, aussi doué soit-il, n'est pas à l'université. Elle est dans les bois, à s'emplir les poumons. Sur un terrain de sport, une plaine de jeux, devant la télé à rien
faire, avec des copains et des copines à engouffrer un gâteau d'anniversaire avec les doigts, chez le glacier, dans une cour de récré, avec un ballon au pied dans la rue, dans un cours de danse,
à pousser le caddie au grand magasin. Pas à l'université. » (Bernard Devos Dumont, délégué général aux droits de l’enfant – 11 décembre 2019)
« Les spécialistes de l’enfance et la presse des Pays-Bas s’interrogent sur la situation de cet enfant exposé aux médias à l’initiative de ses parents, et qui le pousseraient à ce tempo rapide
comme le feraient les proches d’un jeune talent du foot. Quid de sa croissance émotionnelle ? » (la libre.be – So.De- 13 décembre 2019)
Lydia, la mère du jeune étudiant, évoque même des menaces: "Ils n'ont pas dit clairement qu'ils allaient contacter la protection de l'enfance si nous nous plaignons d'eux mais ils ont fait
comprendre qu'ils se demandaient si nous ne mettions pas trop de pression sur Laurent. » (RTL info – Mathieu Langer – 10 décembre 2019)
Et si ce jeune garçon avait, tout simplement, des besoins différents ?
C’est bien ici que nous touchons cette difficulté à tenir compte de la Différence. Laurent Simons est hors norme, mais c’est la norme qui dicte les règles et nous devons tous nous y conformer
sous peine de « sanctions ». Cette force sociale est, en réalité, tout à fait NORMALE. Le respect de ces normes est nécessaire à la cohésion sociale, et le non-respect, peut engendrer
l’exclusion.
Toute sa vie, Laurent Simons devra s'adapter aux attentes sociétales tout en se respectant parce qu’il est différent.
Dans ce jeu adaptatif, la personne en situation de différence tente de s’affirmer en fonction des attentes sociales et tente de trouver une place qui lui convient… ou pas !
La personne différente peut alors développer un faux-self comme stratégie adaptative à un environnement contraignant, anormal (par rapport à son propre référentiel). Ce masque social a une
fonction importante en permettant la protection de sa vraie personnalité tout en se conformant aux exigences de l’environnement.
Chez une personne à haut potentiel, une réussite scolaire brillante peut être l’expression du vrai-self ou du faux-self.
Pour le jeune Laurent Simons, nous ignorons si les mécanismes de surinvestissements scolaires engendrent des problématiques et/ou si un faux-self tout puissant est présent…
L’enfant HP peut avoir un rythme d’apprentissage différent des autres enfants. Certains auront des acquis précoces dans certains domaines scolaires, d’autres pas.
De nombreux parents d’enfants HP se questionnent quant à une accélération du cursus scolaire afin de respecter le rythme d’apprentissage de leur enfant HP, quant aux réponses à apporter à ses
demandes d’apprentissages anticipés. Permettre à un enfant d’accélérer son rythme d’apprentissage peut être une adaptation nécessaire. L’environnement bien que normatif sera moins contraignant
car il permettra à l’enfant de suivre ses besoins en adaptant le cursus scolaire.
N’y a –t-il pas un risque, en focalisant les adaptations sur la scolarité exclusivement, de mener l’enfant HP à des mécanismes de sur-intellectualisation et de s’oublier en chemin ?
Des mécanismes de sur-intellectualisation peuvent éloigner l’enfant de sa véritable personnalité et une souffrance risque de s’installer. Cette souffrance est souvent difficilement décelable
extérieurement. Ce rôle social perdra alors son rôle de protection du vrai-self car il le remplacera.
Et qu’en sera-t-il de son adaptation sociale durant l’enfance, l’adolescence ? Sera-t-il en décalage par rapport à son groupe scolaire ?
Très tôt, l’enfant HP risque d’enfiler un masque pour se sociabiliser. Cette personnalité sociale a une utilité car elle lui permet de s’intégrer au sein de certains groupes. L’enfant montre
qu’il est comme les autres et les autres lui renverront alors une image positive.
Ce camouflage demande un contrôle permanent. S’il devient inconscient, un sentiment de vide peut se développer. L’hyper-contrôle et la souffrance que ce vide engendrent pourront s’exprimer par
des moyens détournés : troubles alimentaires, troubles du sommeil, anxiété, état dépression, troubles psychosomatiques… Et, même entouré, c’est la solitude qui l’accompagne au quotidien…
L’amitié est un besoin chez l’enfant et l’adolescent. Il est donc important de veiller à ce qu’il développe des relations d’amitié solides où sa vraie personnalité peut s’exprimer.
Au plus tôt l’enfant sera identifié dans ses différences, au mieux il se construira.
Un accompagnement axé sur la compréhension de ses spécificités pourra se mettre en place afin qu’il puisse s’affirmer tout en se respectant.
Lui permettre de se retrouver en situation de normalité dans un groupe (groupe d’enfants à haut potentiel par exemple) lui permettra également de s’exprimer de manière vraie car il ne sera plus /
pas en situation de différence.
Guider la personne HP afin qu’elle trouve sa place dans notre société normative tout en se respectant est l’objectif de l’accompagnement que nous offrons au sein de l’asbl AvanceToi depuis
maintenant dix ans.
Nous partons de la souffrance des personnes, du sentiment de différence, des comportements jugés inadaptés afin de trouver un juste équilibre entre vrai-self et mécanismes d’adaptations.
